Phnom Penh : à la croisée des chemins

De Sihankouville nous rallions Phnom Penh en minibus. Réservé au même moment que notre bateau retour depuis l’île de Koh Rong Sanloem, nous l’attendons au pied d’un immeuble en construction sur la route pas encore revêtue. Sihankouville est un vaste chantier à la Sim-City. La ville entière est en travaux, sous la pression financière d’investisseurs chinois… On se croirait d’ailleurs dans une petite ville chinoise tellement tout est inscrit en sinogrammes sur les enseignes des hôtels et autres magasins encore en construction. La ville côtière devait être paisible il y a encore quelques années. La transformation en ville balnéaire tournée sur le tourisme et la consommation de masse est un véritable massacre. Après quelques discussions avec des Cambodgiens, on se demande même si les habitants en verrons un quelconque bénéfice, tant ceux-ci sont accaparés par des sociétés étrangères… quand la politique étrangère chinoise défigure les pays voisins, on s’en doutait, nous l’avons vu à l’œuvre.
Le fameux bus est en retard. Ce qui ne nous étonne pas vraiment. Étant donné l’état des routes, le calcul est assez vite fait. Nous attendons donc deux heures à l’ombre avec les autres passagers. Le père d’une famille francophone sert de traducteur au téléphone avec le chauffeur, c’est lui qui annonce les retards consécutifs. Le jeune homme de la société qui nous avait indiqué le lieu d’attente ne parlant visiblement pas l’anglais.
Finalement le minibus arrive, et nous pouvons tous grimper à l’intérieur. Le temps de faire refroidir un peu le moteur, nous voilà en route.
Nous arriverons à 22h en ville et notre chauffeur fera le tour des différents hôtels pour nous déposer chacun notre tour. Le trajet s’est parfaitement déroulé et nous découvrons notre dortoir de 14 lits pour la nuit.
Nous nous reposons bien et réservons la matinée pour petit-déjeuner et travailler au bar de l’auberge qui donne sur une piscine. Le cadre est agréable et y restons jusqu’en début d’après-midi. Nous quittons en effet cette sympathique auberge pour nous rendre à l’hôtel que notre amie Carmen a réservé pour 2 nuits. Carmen nous rend visite pour 2 semaines au Cambodge, profitant de notre voyage pour venir le visiter. Ça nous fait plaisir d’avoir de la compagnie et ça change de notre petite routine 🙂 On a hâte de la retrouver. En plus l’hôtel a sa propre piscine !
On nous accueille avec un jus de fruit de la passion et nous montons dans la chambre spacieuse et très fraîche !
Carmen nous retrouve deux heures plus tard tambourinant à la porte. Ça y est, nous voilà au complet pour les deux semaines à venir !
En plus de sa bonne humeur, Carmen arrive avec des petites douceurs qui nous manquaient : foie-gras, rosette et comté ! La France ayant laissé quelques traces de son protectorat au Cambodge, nous trouvons même du pain et nous faisons un petit festin bien franchouillard au bord de la piscine de l’hôtel. Le repas du soir est délicieux !


Nous consacrons les jours qui suivent à la découverte de la ville. Avec en premier lieu la visite de l’ancienne prison S21. La visite est glaçante. L’ancien lycée qui avait servi de prison secrète et de centre de torture aux Khmers Rouges dans les années 70 est maintenant un musée extrêmement clair et juste. L’audio guide nous emmène avec respect et mesure dans l’histoire tragique du pays qui s’est lui même consumé de l’intérieur. Anéantissant les Hommes et les moyens de production, les Khmers Rouges ont enfermés et torturés plus de 18’000 personnes dans cet ancien lieu de savoir. Nous marchons en silence à travers les anciennes salles de classe transformées en cellules collectives et individuelles où l’organisation obtenait des aveux forcés des détenus. Aveux tout aussi invraisemblables que l’était le projet des Khmers Rouges : purifier la population pour repartir à zéro, au prix de millions de vies. Décimer le nouveau peuple, pour rebâtir l’ancien peuple, au moyen d’une entreprise de destruction systématique des opposants au régime.

La matinée est lourde et pourtant très instructive avec le même sentiment qui reste à la sortie, similaire à celui qui nous avait pris en sortant du musée des souvenirs de la guerre du Viêtnam, comment peut-on en arriver là, et comment peut-on imaginer reproduire ces horreurs…
De retour à l’hôtel nous planifions la suite de notre itinéraire et profitons d’une rapide escapade en ville pour retirer nos tickets de bus pour Kratie que nous rejoindrons le lendemain.

Nous profitons une dernière fois du bord de la piscine et dégustons les restes des petites douceurs de chez nous avant de nous coucher. Fins prêts pour les 7h de bus qui nous attendent le lendemain.

La nuit est reposante et nous marchons vers la gare routière sous le ciel encore frais du matin.
Le bus est là, c’est parti pour la suite !
