Hué : entre soleil et histoire

Nous rejoignons la ville de Hué en train et arrivons assez tôt le matin. Il fait chaud. Le ciel est clair. C’est sûr, demain on met un short ! La ville est déjà accueillante à la sortie de la gare, l’atmosphère qui règne incite à la balade. Il y a toujours de nombreux scooters et autres véhicules, mais les rues sont larges et la présence de la rivière est prétexte à une jolie et longue promenade piétonne le long de l’eau.
Ça tombe bien parce que c’est exactement notre chemin pour rejoindre notre auberge. A Hué nous avons choisi un dortoir dans le quartier animé. C’est aussi le quartier des touristes. Bonne nouvelle, notre auberge est située dans une contre allée, à l’écart de la rue principale. Nous nous présentons à l’accueil, trop tôt pour avoir notre lit, mais nous sommes invités à nous servir de la douche partagée si nous le souhaitons. Et nous ne souhaitions que ça, une bonne douche après ce long trajet en train et le début de journée déjà bien transpirant !
Petite douche froide prise et sacs à dos laissés à l’accueil, nous filons en ville pour visiter un peu. Les rues adjacentes sont effectivement très touristiques. Nous décidons d’aller directement visiter la cité impériale. Construite selon des principes similaires à la cité interdite de Pékin, celle-ci a été très largement détruite pendant la guerre puis reconstruite au fur et à mesure pour redonner vie aux bâtiments et infrastructures qui avaient abrité le dernier empereur du Viêtnam et sa famille.
Le lieu est très vaste et très partiellement restauré, on perçoit très bien les ravages de la guerre sur ces bâtiments dont il ne reste parfois plus rien, ou seulement les traces d’un ancien mur qui se laisse deviner dans l’herbe qui envahit maintenant les lieux.
Nous nous baladons presque toute la journée dans les différentes parties de la cité, se laissant même aller à une petite sieste dans l’ancien jardin de repos et de lecture de l’empereur. Le calme et l’ombre prodigués par ce petit abris en surplomb du petit lac et protégé de la route par de solides remparts invite en effet au repos. Il faut dire qu’on n’a pas beaucoup dormi dans le train hein !
La cité est très belle et le travail de restauration semble fait avec beaucoup de soucis de préservation et de cohérence historique.
Cette cité étant très récente par rapport à l’image qu’on se fait de ce genre de lieu, on a l’impression qu’elle arrive du passé, et qu’elle était coincée entre la modernité à l’européenne et le traditionalisme vietnamien. Comme une réminiscence du passé qui subsisterait face aux empires coloniaux. Étrange sentiment.

La journée est déjà bien entamée lorsque nous rentrons à notre auberge pour récupérer les clefs de notre dortoir. C’était sans compter sur le traitement contre des “bugs” qui est actuellement en cours dans la chambre. On nous propose donc de changer d’auberge. Apparemment le lieu où nous avons réservé possède trois établissements dans le quartier. A trois minutes à pied, nous voilà dans notre nouveau dortoir. Tout est bien qui finit bien. Les prestations sont identiques et le dortoir est aussi dans une petite allée. Il fait 10 degrés de moins que dans la rue, soit 25 dans le dortoir, le choc est assez intense en y rentrant pour la première fois ! Mais finalement ça aide a bien dormir ! Nous passerons de très bonnes nuits ici.
Le lendemain nous avions réservé un tour. Notre premier tour organisé du voyage et peut-être même de notre vie. On est tout excité d’aller visiter les tunnels de la DMZ (l’ancienne zone démilitarisée) qui séparaient le nord du sud du pays au niveau du 17e parallèle.
Pick-up à notre auberge à 7h, la même heure que le petit déjeuner… on a du expédier les pancakes à la banane pour aller se laver les dents avant de partir à 7h05 😉
Nous voilà dans le mini bus en direction de Da Nang à un peu moins de 2 heures de route. La journée va être chargée ! Il y a en effet deux heures avant d’atteindre la ville d’où commence effectivement le tour guidé, nous récupérons notre guide sur la route. Elle est charmante et connaît très bien la région, cela fait 20 ans qu’elle emmène des touristes visiter la zone nous confie-t-elle lors de la visite du musée en milieu de journée. Le démarrage du tour est également le moment pour un monsieur discret assis à l’avant de s’apercevoir qu’il n’est pas dans le tour qu’il avait choisi… la guide de lui répondre : no no, this is DMZ tour… bon, celui là a l’air de finalement lui convenir. On s’imagine quand même avec Chloé que ce monsieur souhaitait peut-être se rendre à la piscine, et non sous terre à visiter des tunnels… Chloé qui est mon meilleur public rira beaucoup à ma blague prétendant que ce monsieur pensait peut-être participer au tour Drive Me to the Zwimming-pool… DMZ…
La jeune femme nous fait une introduction historique très complète pendant le trajet, retraçant l’histoire de la zone et celle de la guerre qui fit rage entre l’armée Viêt Minh et les États-Unis. Les séquelles sont de moins en moins visibles grâce aux efforts de reforestation et de décontamination de plusieurs milliers de kilomètres-carrés de terre. Mais on perçoit encore la terre meurtrie par endroit. On en apprend aussi beaucoup sur les populations qui habitaient la zone et qui ont su s’adapter, notamment grâce aux tunnels, pour continuer à vivre dans cette zone qui était quotidiennement bombardée pendant la guerre… Les tunnels sont en effet le résultat du travail des paysans eux mêmes, qui ont décidé de rester sur leur terre et de construire ces abris, non seulement pour aider la résistance armée, mais surtout pour vivre sous terre.
On apprend que 6000 personnes ont vécus dans les tunnels pendant plus de 6 ans, et que 70 bébés y sont nés. Incroyable. Des familles entières vivaient entre 12 et 24 m sous terre, dans de très petites alcôves. Notre visite est éclairée grâce à de petites ampoules, on imagine qu’à l’époque il devait régner un noir engloutissant. Il fallait en effet limiter les émissions de fumées, donc l’éclairage a la bougie ou aux torches pour ne pas révéler l’emplacement de ces tunnels. Incroyable visite. On ne tient presque pas debout, la majorité des tunnels sont larges pour une personne, il y a des zones de croisement. Mais la vie s’organisait dans ces dizaines de kilomètres creusés à la main et à la pioche dans une terre argileuse. Incroyable.

Le tour dure toute la journée, nous faisant parcourir plusieurs dizaines de kilomètres sur de nombreuses petites routes. Au delà de l’aspect historique, c’est aussi l’occasion d’entrer dans la campagne vietnamienne, loin de la côte et des grandes villes du pays. On sent l’isolement de certains hameaux ici.
Nous voilà sur le retour vers Hué, nous rejoignons notre auberge pour y passer notre dernière nuit. Notre bus pour Hoi An part de lendemain après midi, nous laissant toute la matinée pour nous balader une dernière fois en ville. La matinée est pluvieuse, mais pas vraiment assez pour nous arrêter, nous faisons un tour au marché couvert, où travaillent essentiellement des femmes. L’une d’elle parlant un français impeccable nous fait visiter les quelques allées menant à son échoppe. “Juste pour regarder” dit-elle. On se prend au jeu. Nous discutons quelques minutes, et la quittons sans avoir acheté le très beau pantalon en soie, made in Vietnam, pas China, et également refusé le foulard “pour ta mère” désespérant la patronne de pouvoir remplir un peu nos sac à dos. On apprend quand même que les hommes font plutôt “le scooter” (comprendre du transport de marchandises et de touristes) alors que les dames font le commerce. Ses deux fils sont à l’école française, ils parlent déjà 5 langues.
Le temps passe vite en marchant, nous nous dirigeons vers notre auberge pour récupérer nos sacs et sauter dans la navette qui doit nous amener au bus pour Hoi An. La navette se transforme en taxi, pour faire 500m. Mais le service était compris, c’est qu’il ne faudrait pas nous faire marcher !
Nous voilà dans notre premier bus couchette, on est comme des gosses découvrant une nouvelle cabane. C’est super confortable.